Métaphysique des cubes (et du compotier), Braque au Grand Palais.
J’avais opté pour une visite à destination myrmécologique, mais je reconnais avoir été un peu effrayé à la vue de la grouillante multitude, non à 6 mais 2 pattes, qui donnait de la mandibule devant le Palais de la Découverte.
Ne pouvant repérer la reine qui les avait tirés du néant, et craignant, dans l’incapacité d’en tarir la source, de succomber aux masses pléthoriques, j’ai opéré un repli stratégique vers le Grand Palais.

La foule, habituellement présente de manière caudale devant l’édifice, brillant par son absence, il était plus sage d’en profiter. Autant traiter le sujet tout de suite, à l’intérieur, il y avait aussi des colonies, plutôt des rouges voire… vermeilles et, on ne l’ignore pas, ces dernières sont souvent plus agressives.
Donc, Georges Braque. En rentrant, je connaissais surtout 2-3 tableaux, de forme ovales avec des formes vaguement violonesques et j’aimais bien la gamme chromatique restreinte utilisée. Et c’est à peu près tout. On apprend dès l’arrivée que Nicolas de Staël, que j’aime beaucoup même lorsqu’il peint du football, fait siéger Braque quelque part sur le Parnasse des peintres (s’il y en a un), une entrée en matière plutôt engageante donc.
1ère période
Le fauvisme, “à la Matisse”. De belles choses comme ce _Paysage de la Ciotat _:

2ème période : on rentre dans les cubes…
…et ce n’est pas fini.
Braque côtoie Picasso et Apollinaire. Pour sa première exposition, Matisse parle de cette peinture nouvelle avec des “petits cubes”, le nom est alors tout trouvé. Tout peut se cubisiser, du paysage au portrait, tandis que petit à petit, les formes s’estompent et la palette chromatique décroit. On aboutit ainsi à des œuvres baroques, sans conservation des lois de la perspective, en camaïeu de gris/brun. Le ciel disparaît avec l’horizon, les ombres sont utilisées pour souligner les formes et les distinguer entre elles plus que pour matérialiser les sources lumineuses.
Grand Nu :

Les sujets sont souvent des natures mortes avec compotier et/ou instrument de musique, le sujet importe moins que les liens qui s’établissent entre les formes et les couleurs.
Grand Nu
Maison à l’Estaque

Les toits à Céret

Nature morte au violon (détail permettant de voir la touche pointilliste de l’artiste)

3ème période : les papiers collés
La partie la moins convaincante de l’exposition, lorsque Braque colle par dessus des ébauches au fusain, des journaux, emballages, papiers peints kitschs.

Compotier et cartes

Rhum et Guitare

4ème période : les cubes. Le retour
Mobilisé en 1914, grièvement blessé, il revient à la peinture en 17. On assiste au retour de la couleur, sous forme d’aplats, mais le vocabulaire n’a pas beaucoup évolué.

La Joueuse de Mandoline

Quelques pièces un peu à part qui laissent les thèmes récurrents sur le bord de la route :

Canéphore

Le Duo

5ème période : la courbe
Si la visite descend d’un étage, l’intérêt remonte. On abandonne un peu le
cubisme, pour découvrir des arabesques et des sculptures. L’artiste était fasciné par les textes antiques grecs et en illustre les grands pages et personnages principaux.
Hélios

Les tableaux deviennent plus sombres avec le retour de la guerre et la période de l’occupation. Misère de la guerre, faim (les poissons), froid (le poêle), vanités, ténébreuses silhouettes de dos.
Les poissons noirs

Vanitas

5-6 voire 7 ème période (je suis perdu dans mes notes) : les séries
Les paysages
Quelques grands tableaux avec des outils agraires et surtout de petites pièces dans un format panoramique où tout est suggéré : pas de ligne d’horizon, pas de vie, de nuages, juste des couleurs, réminiscence de certains Van Gogh (Champs de blé sous un ciel d’orage). Impossible de les prendre en photos, dommage.
La série des billards (où l’on retrouve nos cubes) avec des billards qui semblent prendre déployer leurs ailes.

Le billard sous le lustre
La série des Ateliers peuplés de grands formes d’oiseaux inquiétants.
Atelier V

La série des oiseaux dont la production a été stimulée par une commande pour les plafonds du Louvre. Les créatures deviennent de plus en plus abstraites, épurées, anxiogènes. Elles évoquent plus souvent le corbeau que la colombe, la nuit la mort.
A Tire d’aile.

Conclusion
Une exposition vraiment intéressante pour découvrir ce peintre même si je lui trouve une baisse de régime au milieu (la 2ème moitié du 2ème étage), où l’accumulation des tableaux n’apporte pas forcément d’éléments nouveaux.
Mention spéciale, quand même, les photos sont autorisées, certes pas pour toutes les œuvres mais c’est vraiment très appréciable.
Infos pratiques :
site officiel :<http://www.grandpalais.fr/fr/evenement/georges-braque>
tarif : 12 euros
Durée : 1 h 45