Le musée du Linge
N'allez pas croire que nous allons traiter chiffons et quand vous connaîtrez le sujet, vous comprendrez que je n'ai pas fait de jeu de mot dans le titre.
De quoi est-il question ? De la bataille du Linge, qui vit de juillet à septembre 2015, s'opposer français et allemands pour des gains territoriaux négligeables et des pertes de 15-20000 hommes au total. Le théâtre, très escarpé, sera ensuite plus calme jusqu'à la fin de la guerre.
Un petit musée, animé - on le sent bien- par des passionnés, raconte le drame en trois parties : film, intérieur et extérieur.
Le film de 13 minutes raconte "à l'ancienne" (quand je dis à l'ancienne, c'est vraiment à la Michelet ou à la Bainville) les combats du point de vue français. Les allemands - pardon les ennemis- se "terrent" et se contentent de repousser les vagues héroïques de chasseurs alpins, voire utilisent des armes interdites (gaz et lance-flammes). Cela dit, passé le parti-un-peu-pris, l'ensemble reste intéressant, cette partie du front étant quand même assez méconnue. Il faut dire que les effectifs en présence (quelques divisions tout au plus, les ordres de batailles sont indiqués mais pas les périodes de présence) montrent un théâtre un peu secondaire par rapport aux forces qui se déchaînent à Ypres ou sur la Marne. Le collet du Linge est un verrou dont la destruction permettrait au armées françaises de déboucher sur Colmar, enfin quand on dit "déboucher" ce serait quand même assez lentement : le relief ne va pas faciliter l'exploitation d'une percée éventuelle. Dans la réalité, cela va surtout permettre de fixer des forces allemandes qui auraient été plus utiles ailleurs.
La partie intérieure du musée détaille uniformes, armements, tactiques et vie vraiment pas rose des soldats.

La présentation est rustique, le plus intéressant est, sans doute, cette vitrine détaillant l'impressionnant inventaire du paquetage standard :

Quelques armes, en très bon état d'ailleurs (ou très bien restaurée, je ne sais pas) comme ce crapouillot français :

Avec ces terrains difficiles, des idées nouvelles apparaissent, témoins l'emploi des chiens de traineaux pour assurer le transport dans la neige. Il faut dire que la logistique est un vrai casse-tête avec des lignes d'approvisionnement françaises à travers les Vosges, tandis que l'Allemand dispose de la plaine d'Alsace et de voies ferrées.

L'extérieur enfin, permet de se rendre compte de l'effroyable proximité entre les 2 lignes ennemies : le no man's land fait 15 m de large voire 5 m entre les avant-postes français et la première ligne allemande. Cette dernière étant en surplomb, cela nous laisse imaginer le cauchemar vécu par les attaquants. En déambulant parmi les barbelés, on a peine à croire, à l'heure des guerres de mouvements modernes, que sur un si petit bout de roche, des hommes ont pu vivre et mourir pendant de longs mois.

La première ligne français est en contrebas au niveau du petit panneau blanc (intelligemment mis en valeur en bleu), la ligne allemande et à droite du chemin entouré en rouge. Le brouillard que nous avions lors de la visite (fin juillet quand même), forme vraiment un linceul sur ce tombeau à ciel ouvert.

Les français parviendront au plus fort de leur avance à gagner, disons 20 - 25 m, en atteignant la troisième ligne allemande avant d'être repoussé par les contre-attaques et l'artillerie allemande bien positionnée.
Jusqu'en 2010 des corps sont régulièrement exhumés :

Curiosité, la visite nous fait descendre dans les tranchées (allemande en l'occurrence) et montre barbelés, boucliers, ouvrages bétonnés :

Un petit musée sympathique (en tout cas aussi sympathique que cela peut être étant donné le sujet) si on laisse un peu de côté la partialité du discours, et qui donne à voir une frange un peu oubliée de la grande guerre.
Prix : 3.5 euros
Durée : 30-45 minutes
Site officiel : http://www.linge1915.com/fr/accueil/